Je me concentre sur le ravitaillement, je fais vraiment le plein, fais quelques pas en marchant pour l’occasion et je sors mon joker ! Du dos de mon dossard, je déscotche le gel énergétique dont je n’ai cessé de vérifier la présence depuis le départ. Fruit tropical, zut ! C’est le même parfum que celui que j’ai eu au 30ème ! Je surmonte sans trop de problème cette déception, et boucle quand même le 36ème en 6’14.

J’entends un spectateur crier que les montées, c’est fini. J’espère qu’il ne se trompe pas comme cette dame qui, au 33ème encourageait en disant : " allez, plus qu’une demi-heure ! ". On s’est regardés avec mes voisins coureurs, on souriait jaune. J’entame alors une nouvelle formule de motivation : je me focalise sur le panneau kilométrique suivant en me disant : et si j’allais rendre visite au panneau 37 (en 5’52). En fait ça doit être signe d’une perte de lucidité totale : je me mets à parler aux panneaux !

Les signes de crampe sont inquiétants maintenant : à chaque foulée je sens la crampe dans le mollet droit qui se forme, se relâche, se reforme, se relâche… Ca fait un suspense assez inquiétant. Je fais de mon mieux pour faire des gestes très réguliers et sans à -coups. Je passe sans un regard le stand du marathon de Vannes. L’odeur de cidre ne me fait pas envie, en fait !

Allez, je dis un petit bonjour au km 38, en 5’49. C’est bien je sens que je tiens le coup. Je me sens surtout bien par rapport à certains voisins. Un coureur qui me semblait en forme voir une connaissance sur le côté. Il se tourne lance un grand " coucou ", reprend sa ligne puis s’arrête, net ! Il crie et saute sur un pied, bloqué par une crampe. Mon mollet reste inquiétant, mais ça ne semble pas empirer. Bonjour, kilomètre 39, content de te voir (en 5’45).

Au ravitaillement du 40ème, je ne prends que de l’eau (mais je bois tout !) et un sucre. Ca sent le bonheur, c’est pas loin, j’y crois ! Je me sens encore relativement bien, mais je n’ose pas accélérer, à cause du mollet. Pas besoin de faire de folie. Et voilà le panneau 41, content de te voir, toi ! Je sens que c’est vraiment bon, alors je m’autorise à me débrider, et je me dis. Tiens, les 195 derniers mètres, c’est comme une série VMA, je pourrais la faire comme ça ! Je passe au panneau 42 (si tu savais ce que j’ai rêvé de toi, sacré panneau !) en 5’27, j’ai déjà accéléré.

Et je vois l’arrivée, je relève la tête pour les photographes et je sprinte ! Bon c’est pas vraiment VMA puisque je couvre les 195m en 50 secondes, mais c’est pas mal (14 km/h quand même) ! Yeeeeeees, j’y suis, le méga-bonus, je passe la ligne en poussant un cri. Je reprends mon souffle, c’est l’émotion, wow ! Je suis passé, je l’ai fait ! Le chrono indique 3h57’12.